2009-2013 |
Pour
commencer, je choisis un objet parmi ceux qui m’entourent, je le place dans une
boite, recouvert d’eau, dans un congélateur.
J’attends.
Je
photographie ensuite l’objet ainsi piégé dans la glace.
Je
me place alors dans la position de l’archéologue qui aurait fait une
trouvaille, jouant sur les changements d’états de la glace, sur la lumière, et
dans un deuxième temps sur la manipulation photographique, pour révéler
l’objet.
Ainsi
traité, il est coupé de sa neutralité fonctionnelle, la glace lui confère un
statut de témoin à explorer, d’objet mystérieux. Il traverse un cycle
intimement lié à celui de l’eau. La fonte totale de la glace va rompre la magie
et le rendre à son état premier.
Il
arrive que la glace, à la manière des cendres de Pompéi, fige le dispositif
dans un équilibre précaire, ou dans l’illusion d’un mouvement.
Je
provoque alors la fonte jusqu’au point de rupture de cet équilibre ou de ce
mouvement, ce qui amène le spectateur à un sentiment de fatalité,
d’impuissance.
La
glace porte en elle les germes de la création et de la destruction : elle
fige, donne l’illusion d’un mouvement possible, et en même temps l’empêche, le
contraint, jusqu’à le rompre lorsqu’elle redevient eau.
Au
final, ce travail réactive la mémoire de notre finitude, et questionne le temps
qui passe et notre manière d’appréhender le réel.
Comme
Damian Hirst dans sa série d’animaux dans le formol, initiée par « The
physical impossibility of death in the mind of someone living », j’aime
l’idée « d’utiliser une chose pour décrire un sentiment ».
Je
m’inspire aussi de Daniel Spoerri dans le « Déjeuner sous l’herbe »,
en invitant le spectateur à regarder l’objet comme on regarde une découverte
archéologique pour tisser une histoire, tout en l’amenant à ranimer une mémoire
collective où l’objet devient symbole.