Excès



- Aylan-


L’Enfant est là
Face contre terre
Mort
Aylan Kurdi, 3 ans, la photo choc du drame des migrants.
C’était il y a un peu plus d’un an, après le naufrage au large de Bodrum d’une triste embarcation qui tentait de rallier l’Europe via l’ile grecque de Kos.
Des enfants blessés, tués dans des massacres viennent hanter notre quotidien.
« C’est la routine », lance un photographe syrien, « ça vous choque ?»

Oui

Cette photo a fait le tour du monde en moins de temps qu’il n’en faut à la terre pour tourner sur elle même.
Démesure…
A-t-on franchi une limite, transgressé une règle tacite ?

Oui

On ne montre pas un enfant mort, même si c’est pour la bonne cause.
Un mort, c’est sous un linceul, on lui couvre les yeux.
Photo banalisée à souhait, la cause qu’elle soutient aussi.
Le soufflet est retombé aussi vite qu’il était monté.

Alors, lui redonner vie un peu à cet enfant, dans la peinture…
Mais pour cela, il faudra passer au-delà de ma propre limite
Celle de porter mon regard sur l’image d’un enfant qui a souffert, qui en est mort
Celle de relayer le scandale d’une fascination collective pour le morbide, pour le sensationnel,
Celle de douter en permanence de savoir s’il faut laisser plus pour témoigner de toute l’horreur, plus qu’une feuille de papier glacé, ancrer celà dans la peinture, réincarner celà dans la peinture….

Ou alors être soi-même au delà de l’excès

Une toute petite image de rien du tout pour dire tout ça, comme adresser une prière à une icône.

Ou alors

Défier le bon goût pour faire croire un instant que c’est là que l’excès se cache…
Mais personne ne se leurre, l’excès est bien ailleurs.



« Aylan », Huile sur toile (35x26,5cm) – Masque, tuba, fleurs artificielles.