Mars 2016 - Expo "Intimacies", le 6B
En 2007, à l'occasion de la Biennale de Venise, l'artiste Sophie calle demandait à 107 femmes, choisies pour leur métier, d'interpréter et de réagir sous un angle professionnel à un mail de rupture qu'elle venat de recevoir.
J'ai imaginé une possible réponse à cette lettre....
J’ai tant
espéré vous lire…
Tant de
jours à guetter un appel, à me consumer dans l’attente de vos mots…
Mais encore
ce silence,
Assourdissant,
Gluant,
Tenace,
De ceux qui
collent à la peau et crient déjà la volonté d’oublier.
Ce silence
comme une fuite,
Une échappée
pas belle
Ce silence
tranchant comme une lame acérée,
Qui ne
laisse de choix que celui d’attendre et se taire
J’ai
attendu. Je me suis tue.
Je me
sentais contaminée par vous
Un virus
dans les interstices de ma vie
Et que mon
corps parfois ne pouvait contenir
Caché entre
les lignes, les mots,
Gracieux,
sordide, d’une puissance terrifiante…
Votre
silence m’a empêchée de respirer.
J’ai pleuré
Pleuré si
fort de ton indifférence
Des larmes
acides que tu ne soupçonnais même pas.
J’ai même
caressé ta photo sur un écran,
Senti la
douceur de ta peau sous la surface lisse et froide
J’ai
effleuré ta bouche
Suivi le
contours de tes traits
Ranimé la
mémoire de ton souffle.
Je me suis
enveloppée de ce souvenir un instant plus réel que tout le reste.
J’ai retenu
ma respiration pour que rien ne s’échappe…
Ton silence
immense a tout englouti,
L’espoir, le
doute, la colère.
Avant que de
savoir, je savais.
Aussi ces
mots que je reçois de vous ne m’atteignent-ils pas toute entière.
Ainsi vous
voilà, tout petit, impuissant à
calmer vos démons,
Si lâche…
A vous lire
on vous croirait happé par de mystérieuses forces
Entrainé
malgré vous vers de cruels abysses où l’angoisse vous étreint ;
Mais vous
êtes seul maître à bord.
Vous attendiez
de moi que je sois le remède miracle à votre intranquillité…
Me
croyez-vous si naïve pour avoir caressé un instant l’espoir de vous faire
changer ?
L’espoir de
vous sauver,
Malgré
vous ?
Vous parlez
de lutte, là où je parle d’amour
Vous parlez
d’engagement, là où je parle d’amour
Vous parlez
de bénéfice, là où je parle de bonheur…
Vous ne
voyez que vous.
Que
m’importe votre franchise, votre honnêteté, qui n’est autre qu’une indulgence à
cette lâcheté qui vous habite.
Cessez donc
de m’aimer, de cette manière qui fut la vôtre !
Cessez donc
de m’aimer tout court !
Nous ne nous
verrons plus.
Et cela
n’est ni injuste, ni désastreux.
La pire des
mascarades, ce ne sont pas ces infidélités que vous évoquez à demi-mot
La pire des
mascarades, c’est d’être étranger à vous-même au point de vous croire capable
d’aimer.
Les masques
sont tombés.
N’ayez
crainte, je prends soin de moi.